jeudi 13 février 2020

99 - Rat crevé

En croisant ce matin un rat crevé, éventré, faisandé au bord d’un égout, je décidai de l’incorporer à ce présent texte et de l’associer à Farrah Fawcett.

Périlleux exercice littéraire, il est vrai.

Par une astucieuse gymnastique de plume, je dois donc faire un lien fulgurant entre le cadavre puant du rongeur et la face parfumée de la radieuse texane.

Histoire de briller pour rien. Ou de me ridiculiser avec fruit.

Partir de la charogne de cette bête aux viscères ouverts et putrides pour arriver au sommet de ce qui, sur Terre et bien au-delà, a été conçu en terme de perfection esthétique. Pas facile, penseront les âmes frileuses.

Je relève pourtant ce défi sans palme ni bénéfice. Mais plein de panache et d’artifices.

Que pourrais-je donc dire de sombre ou de lumineux, de sot ou de sensé, d’opaque ou de fin pour mettre de la flamme sur de la neige et rendre la pierre aussi digeste que l’azur ?

Tout en me posant ces questions puériles, stériles, frivoles, du bout de ma chaussure je m’amusais à remuer les restes de l’animal en décomposition.

Et puis, dans un subit élan de dégoût mêlé de mépris pour ce que fut ce nuisible de son vivant et ce qu’il est devenu après trépas, j’éjectai le cadavre d’un coup de pied leste et précis. Je le fis voltiger assez haut avant qu’il ne valdingue en quelque recoin éloigné.

En fait, sans le vouloir, je l’avais balancé dans un parterre de roses magnifiques.


Et c’est là que mon texte prend racine.

Cette créature misérable, c’est une ordure de notre monde que j'ai jetée dans un jardin floral rédempteur.

Tandis que Farrah Fawcet c’est au contraire un champ de fleurs qui s’est déversé sur les misères de notre monde.

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